Deux sociétés à l’épreuve du chômage. France/Belgique 1880-1939
Leleux, Marc
Deux sociétés à l’épreuve du chômage. France/Belgique 1880-1939 - 2020.
82
La question du chômage apparaît centrale dans les mutations qui affectent le monde du travail au cours du xixe siècle. La persistance d’une pluriactivité protoindustrielle met cependant en lumière une certaine adaptation des travailleurs aux périodes de pénuries de travail. Le chômage est récurrent, souvent lié au rythme des saisons et, si les affaires reprennent vite, chacun s’y résigne par la force des choses.Ce n’est que vers la fin du siècle, avec l’entrée massive des masses rurales en prolétarisation et l’enlisement dans une période de crise économique durable, que le chômage se mue en « maladie sociale » qu’à travers la recherche d’une définition du chômeur et une volonté de catégorisation et de contrôle des populations ouvrières, les pouvoirs publics vont tenter de juguler. De part et d’autre de la frontière franco-belge, le traitement apporté à ce pan essentiel de la question sociale est différent et doit beaucoup aux structurations politiques et syndicales de chaque pays.La parenthèse du premier conflit mondial modifie toutefois l’approche de la question en faisant de la main-d’œuvre inoccupée un enjeu majeur de la conduite de la guerre. Elle oblige à repenser la situation du chômeur et les formes d’aides qui lui sont versées. Elle ouvre également de nouvelles perspectives, qui ne disparaitront pas toujours au terme du conflit, quant à la perception du rôle de l’État ou des pouvoirs locaux.Le débat sur l’indemnisation du chômage, par lequel les différents acteurs politiques et sociaux de chaque pays ne cessent de se déchirer entre assurance et assistance, atteint son paroxysme durant l’entre-deux-guerres. Contexte international et caractéristiques locales exercent une influence déterminante quant aux options choisies dans le traitement d’un problème qui, dès lors et jusqu’à nos jours, n’a eu de cesse de susciter les polémiques les plus passionnées. The question of unemployment appeared central in the changes that affected the world of work during the 19th century. The persistence of proto-industrial pluriactivity, however, highlighted a certain adaptation of workers to periods of labor shortages. Unemployment was recurrent, often linked to the rhythm of the seasons, and while business picked up quickly, everyone resigned themselves to it by force of circumstances.It was only towards the end of the century, with the massive entry of the rural masses into proletarianization and the stalemate in a period of lasting economic crisis, that unemployment turned into a “social disease” that the public authorities would try to curb through the search for a definition of the unemployed and a desire to categorize and control working populations. On both sides of the Franco-Belgian border, the treatment given to this essential part of the social question was different and owed a great deal to the political and union structures of each country.The parenthesis of the First World War, however, changed the approach to the question by making idle labor a major issue in the conduct of war. It forces us to rethink the situation of the unemployed and the forms of aid paid to them. It also opens up new perspectives, which will not always disappear at the end of the conflict, with regard to the perception of the role of the state or local authorities.The debate on unemployment compensation, by which the different political and social actors in each country are constantly tearing themselves between insurance and assistance, reached its climax during the interwar period. The international context and local characteristics exerted a decisive influence on the options chosen in the treatment of a problem which, from then on and until today, has constantly aroused the most heated controversies.
Deux sociétés à l’épreuve du chômage. France/Belgique 1880-1939 - 2020.
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La question du chômage apparaît centrale dans les mutations qui affectent le monde du travail au cours du xixe siècle. La persistance d’une pluriactivité protoindustrielle met cependant en lumière une certaine adaptation des travailleurs aux périodes de pénuries de travail. Le chômage est récurrent, souvent lié au rythme des saisons et, si les affaires reprennent vite, chacun s’y résigne par la force des choses.Ce n’est que vers la fin du siècle, avec l’entrée massive des masses rurales en prolétarisation et l’enlisement dans une période de crise économique durable, que le chômage se mue en « maladie sociale » qu’à travers la recherche d’une définition du chômeur et une volonté de catégorisation et de contrôle des populations ouvrières, les pouvoirs publics vont tenter de juguler. De part et d’autre de la frontière franco-belge, le traitement apporté à ce pan essentiel de la question sociale est différent et doit beaucoup aux structurations politiques et syndicales de chaque pays.La parenthèse du premier conflit mondial modifie toutefois l’approche de la question en faisant de la main-d’œuvre inoccupée un enjeu majeur de la conduite de la guerre. Elle oblige à repenser la situation du chômeur et les formes d’aides qui lui sont versées. Elle ouvre également de nouvelles perspectives, qui ne disparaitront pas toujours au terme du conflit, quant à la perception du rôle de l’État ou des pouvoirs locaux.Le débat sur l’indemnisation du chômage, par lequel les différents acteurs politiques et sociaux de chaque pays ne cessent de se déchirer entre assurance et assistance, atteint son paroxysme durant l’entre-deux-guerres. Contexte international et caractéristiques locales exercent une influence déterminante quant aux options choisies dans le traitement d’un problème qui, dès lors et jusqu’à nos jours, n’a eu de cesse de susciter les polémiques les plus passionnées. The question of unemployment appeared central in the changes that affected the world of work during the 19th century. The persistence of proto-industrial pluriactivity, however, highlighted a certain adaptation of workers to periods of labor shortages. Unemployment was recurrent, often linked to the rhythm of the seasons, and while business picked up quickly, everyone resigned themselves to it by force of circumstances.It was only towards the end of the century, with the massive entry of the rural masses into proletarianization and the stalemate in a period of lasting economic crisis, that unemployment turned into a “social disease” that the public authorities would try to curb through the search for a definition of the unemployed and a desire to categorize and control working populations. On both sides of the Franco-Belgian border, the treatment given to this essential part of the social question was different and owed a great deal to the political and union structures of each country.The parenthesis of the First World War, however, changed the approach to the question by making idle labor a major issue in the conduct of war. It forces us to rethink the situation of the unemployed and the forms of aid paid to them. It also opens up new perspectives, which will not always disappear at the end of the conflict, with regard to the perception of the role of the state or local authorities.The debate on unemployment compensation, by which the different political and social actors in each country are constantly tearing themselves between insurance and assistance, reached its climax during the interwar period. The international context and local characteristics exerted a decisive influence on the options chosen in the treatment of a problem which, from then on and until today, has constantly aroused the most heated controversies.
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