Produire des inégalités environnementales justes ?
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La qualité de l’environnement, progressivement instituée en bien collectif, est devenue aujourd’hui un objet d’action publique légitime, mais aussi un élément de discrimination au sein des populations. L’analyse de ces discriminations, appelées inégalités environnementales, est au cœur d’études récentes destinées à les objectiver et à mieux comprendre les processus qui les produisent. Dans cette lignée, l’article appréhende une forme spécifique d’inégalité peu étudiée à ce jour – l’effort environnemental – en comparant les effets de deux dispositifs d’intervention publique : la création du Parc national des Calanques et la contractualisation de mesures agro‑environnementales en Dordogne. Il montre que l’effort est inégalement réparti et qu’il amplifie les inégalités environnementales ou professionnelles existantes. La démarche qualitative adoptée révèle l’influence de la concertation ainsi que celle de la compensation financière dans la production de telles inégalités. Cette approche permet de contribuer à une controverse spécifique aux inégalités environnementales – la compensation rend‑elle les inégalités justes ? – et interroge plus largement l’équité des politiques publiques environnementales. Si les acteurs institutionnels impliqués dans la mise en œuvre des dispositifs étudiés justifient par le principe du mérite la contribution inégale des différents groupes concernés, l’analyse montre que l’application de ce principe repose sur des « modèles de mésestime institutionnalisés » (Fraser, 2011) propres à désavantager les plus dominés.
Producing fair environmental inequalities ?Environmental quality, gradually instituted as a collective good, is nowadays a legitimate aim of public action, but also a factor of discrimination within populations. The analysis of these discriminations, namely that of environmental inequalities, is the subject of recent studies that intend to objectify them and better understand the processes that produce them. Along the same line, this article deals with a specific and little studied form of inequality – environmental effort – by comparing the effects of two public policies : the creation of the National park of Creeks and the contracts of special agro‑ environmental measures in Dordogne. It shows that this effort is unevenly allocated and that it amplifies the existing environmental or professional inequalities. The qualitative approach adopted here reveals the influence of dialogue as well as of financial compensation in the production of such inequalities. This approach provides the opportunity to contribute to a controversy specific to environmental inequalities : does monetary compensation make the inequalities fairer ? More broadly, it questions the equity of environmental public policies. Even though the institutional stakeholders involved in the implementation of the studied public policies justify the unequal contribution of the different concerned groups by the principle of merit, the analysis shows that the application of this principle is based on “institutionalized patterns of low esteem” (Fraser, 2011) which disadvantage the most dominated groups.
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