La route des succédanés. Les remèdes exotiques, l’innovation médicale et le marché des substituts au XVIe siècle
Type de matériel :
TexteLangue : français Détails de publication : 2019.
Sujet(s) : Ressources en ligne : Abrégé : Cet article explore l’histoire des drogues exotiques à travers une question centrale quoique souvent ignorée : l’usage des succédanés. Il compare pour cela les plantes originaires d’« Orient » aux plantes originaires d’Amérique, parce qu’elles occupent une place opposée dans ce processus. D’un côté, les remèdes orientaux les plus utilisés au xvie siècle sont connus depuis le Moyen Âge, voire l’Antiquité. Aux côtés des épices, avec lesquelles ils se confondent souvent, ils font partie des produits les plus valorisés sur le marché européen. Leur coût et leur fréquente indisponibilité favorisent la fraude ainsi que la recherche de produits pouvant les remplacer. De l’autre côté, les remèdes américains, par définition inconnus des Anciens, sont souvent abordés à partir de leur ressemblance avec les pharmacopées européennes, méditerranéenne et asiatique. Ils entrent ainsi sur le marché européen en tant que succédanés. En observant comment les médecins et les apothicaires ont, au cours du xvie siècle, employé et étudié ces produits, l’article tire trois conclusions principales. Il montre tout d’abord que la relecture humaniste des Anciens a accentué, notamment à propos de la pharmacopée orientale, la distinction entre des plantes « vraies » ou « originales » et des plantes « communes » ou « vulgaires ». Il souligne ensuite que l’usage des substituts a été entouré d’une méfiance parce qu’il pouvait prendre pour équivalentes des choses qui ne l’étaient pas, entretenant ainsi les confusions et les fraudes. Il montre enfin que la pratique de la substitution a aussi pu être à l’origine d’innovations : en attribuant, grâce au jeu des ressemblances, des usages nouveaux aux plantes, certains auteurs ont pu revaloriser la pharmacopée américaine qui devint plus qu’un réservoir de succédanés.Abrégé : This article explores the history of exotic drugs through a central but often ignored issue : the use of substitutes. For this purpose, it compares plants originating from the « East » with plants originating from America, because they occupy an opposite spot in this process. On the one hand, the most commonly used oriental remedies in the 16th century have been known since the Middle Ages or even Antiquity. Alongside spices, with which they are often confused, they are among the most highly valued products on the european market. Their cost, and their frequent unavailability, encourage fraud, as well as the search for products that can replace them. On the other hand, American remedies, by definition unknown to the Ancients, are often approached on the basis of their similarity to european, mediterranean and asian pharmacopoeias. They thus enter the european market as substitutes. By observing how physicians and apothecaries used and studied these products during the 16th century, the article draws three main conclusions. First of all, it shows that the humanist rereading of the Ancients accentuated, particularly with regard to the oriental pharmacopoeia, the distinction between « true » or « original » plants and « common » or « vulgar » plants. He then points out that the use of substitutes has been surrounded by mistrust because he could take things that were not equivalent, thus perpetuating confusion and fraud. Finally, it shows that the practice of substitution has also been at the origin of innovations : by attributing, thanks to the interplay of similarities, new uses to plants, some authors have been able to revalue the american pharmacopoeia, which has become more than a reservoir of substitutes.
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Cet article explore l’histoire des drogues exotiques à travers une question centrale quoique souvent ignorée : l’usage des succédanés. Il compare pour cela les plantes originaires d’« Orient » aux plantes originaires d’Amérique, parce qu’elles occupent une place opposée dans ce processus. D’un côté, les remèdes orientaux les plus utilisés au xvie siècle sont connus depuis le Moyen Âge, voire l’Antiquité. Aux côtés des épices, avec lesquelles ils se confondent souvent, ils font partie des produits les plus valorisés sur le marché européen. Leur coût et leur fréquente indisponibilité favorisent la fraude ainsi que la recherche de produits pouvant les remplacer. De l’autre côté, les remèdes américains, par définition inconnus des Anciens, sont souvent abordés à partir de leur ressemblance avec les pharmacopées européennes, méditerranéenne et asiatique. Ils entrent ainsi sur le marché européen en tant que succédanés. En observant comment les médecins et les apothicaires ont, au cours du xvie siècle, employé et étudié ces produits, l’article tire trois conclusions principales. Il montre tout d’abord que la relecture humaniste des Anciens a accentué, notamment à propos de la pharmacopée orientale, la distinction entre des plantes « vraies » ou « originales » et des plantes « communes » ou « vulgaires ». Il souligne ensuite que l’usage des substituts a été entouré d’une méfiance parce qu’il pouvait prendre pour équivalentes des choses qui ne l’étaient pas, entretenant ainsi les confusions et les fraudes. Il montre enfin que la pratique de la substitution a aussi pu être à l’origine d’innovations : en attribuant, grâce au jeu des ressemblances, des usages nouveaux aux plantes, certains auteurs ont pu revaloriser la pharmacopée américaine qui devint plus qu’un réservoir de succédanés.
This article explores the history of exotic drugs through a central but often ignored issue : the use of substitutes. For this purpose, it compares plants originating from the « East » with plants originating from America, because they occupy an opposite spot in this process. On the one hand, the most commonly used oriental remedies in the 16th century have been known since the Middle Ages or even Antiquity. Alongside spices, with which they are often confused, they are among the most highly valued products on the european market. Their cost, and their frequent unavailability, encourage fraud, as well as the search for products that can replace them. On the other hand, American remedies, by definition unknown to the Ancients, are often approached on the basis of their similarity to european, mediterranean and asian pharmacopoeias. They thus enter the european market as substitutes. By observing how physicians and apothecaries used and studied these products during the 16th century, the article draws three main conclusions. First of all, it shows that the humanist rereading of the Ancients accentuated, particularly with regard to the oriental pharmacopoeia, the distinction between « true » or « original » plants and « common » or « vulgar » plants. He then points out that the use of substitutes has been surrounded by mistrust because he could take things that were not equivalent, thus perpetuating confusion and fraud. Finally, it shows that the practice of substitution has also been at the origin of innovations : by attributing, thanks to the interplay of similarities, new uses to plants, some authors have been able to revalue the american pharmacopoeia, which has become more than a reservoir of substitutes.




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