Les indicateurs sociaux, révélateurs des tensions entre aspirations à la durabilité et préservation des modèles d’affaires existants
Type de matériel :
4
The transposition of the European Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD) into French law offers a rare opportunity to observe, in real-time, how diversity indicators can be reimagined in large corporations. Conceived as an opportunity for moral reform, the Directive encourages major CAC40 groups to reconsider their diversity indicators to comply with a new reporting requirement: addressing “non-financial” topics with the same rigor as financial themes in an integrated sustainability report. Drawing on the economics of conventions and the sociology of quantification, we explore how agreements are forged within organizations to determine which diversity indicators will ultimately be presented under the CSRD framework. In this regard, we analyze the value conflicts among stakeholders, arising from the illusion of neutral and objective quantification; the role of authority figures (hierarchies and consulting firms); and the decision-making inertia caused by the reliance on pre-existing tools. Our research demonstrates that the notion of double materiality—a cornerstone of the CSRD designed to justify an organization’s strategy in terms of risks, opportunities, and impacts on its stakeholders—relies on a theoretical premise that remains unproven (the compatibility between the aspiration for sustainability and the preservation of existing business models) and on practices that hinder the realization of the sustainability values advocated by the CSRD.
La transposition en droit français de la directive européenne de durabilité (Corporate Sustainability Reporting Directive, CSRD) représente une occasion rare de comprendre « à chaud » la façon dont les indicateurs de diversité peuvent être repensés dans les grandes entreprises. Pensée comme une opportunité de réforme morale, la Directive encourage les grands Groupes du CAC40 à reconsidérer leurs indicateurs de diversité pour répondre à une nouvelle exigence de publication : rendre compte de thématiques « extra-financières » au même titre que les thématiques financières, dans un rapport intégré de durabilité. En mobilisant l’économie des grandeurs et la sociologie de la quantification, nous explorons les façons dont les accords se construisent à l’intérieur d’une même organisation pour choisir les indicateurs de diversité que l’entreprise donnera finalement à voir au prisme de la CSRD ; à cet égard, nous analysons les conflits de valeurs entre acteurs, nés de l’illusion d’une quantification neutre et objectivante, du rôle de figures d’autorité (hiérarchie et cabinets de conseil), de l’inertie décisionnelle liée au poids des outils préexistants aux controverses. Nos travaux montrent que la notion de double-matérialité, pierre angulaire de la CSRD et dont le rôle est de permettre de justifier la stratégie de l’organisation au regard des risques-opportunités-impacts sur ses parties prenantes, s’appuie sur un postulat théorique qui reste à démontrer (la compatibilité entre aspiration à la durabilité et préservation des modèles d’affaires existants) et des pratiques qui entravent l’émergence des valeurs de durabilité prônées par la CSRD.
Réseaux sociaux