Les servantes de Schwäbisch Hall au XVIIe siècle : destin et appartenance sociale
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RésuméConcernant le service féminin en ville à l’époque moderne, on peut dire que jusqu’ici l’historiographie a suivi deux voies : d’une part le service est interprété comme un phénomène propre aux couches sociales inférieures ; d’autre part il est vu comme une étape normale et appréciée de la vie des femmes en général. Le service domestique, pour les filles, est alors considéré comme l’apprentissage pour les garçons. Les registres de décès de Schwäbisch Hall (une ville libre du sud de l’Allemagne) nous permettent de reconsidérer ces deux interprétations : dès 1635, les ministres du culte rédigeaient un bref résumé de la vie de tous ceux qui mouraient. L’analyse de ces données montre l’insuffisance des interprétations courantes. D’une part les servantes venaient de toutes les couches sociales ; d’autre part le service semble avoir été dans la vie des servantes le moment d’une grande fracture, surtout pour celles qui étaient issues de bonne famille. Si le service n’était ni un phénomène lié aux couches sociales inférieures, ni une préparation aux tâches ménagères ultérieures, comment le comprendre ?L’auteur propose de l’étudier comme un élément de l’« état » ( Stand) de maison, la classification en « états » étant, à l’époque, à la suite de la Réforme, la conséquence du besoin d’ordre et la maison la base de tout ordre social. Entrer en service signifiait changer d’état et se retrouver au plus bas de la hiérarchie sociale. Cela posait problème, surtout aux jeunes filles de bonne famille. Ainsi la hiérarchie des états, qui a correspondu à un besoin d’ordre, a-t-elle été aussi la source de conflits, parce qu’elle ne reflétait pas ou ne reflétait plus l’idée que ces personnes se faisaient d’elles-mêmes. Les maisons, qui auraient dû constituer la base même de l’ordre social, pouvaient donc devenir source de nouveaux désor-dres – et donc hâter la fin de ce régime.
Concerning the service of maids in the early-modern period, there are two main theses in the historiography to be considered: it is either regarded as a lower classes’ phenomenon or as a usual phase in the life of women in general with similar functions like the apprenticeship in the boys’ life. The registers of deaths in Schwäbisch Hall, a small free city in the South of Germany, make it possible to reassess these theses, because since 1635 a short resume of the life has been written about all people who died in this city, poor or rich, man or woman, young or old. The analysis of the information given in this article shows that none of these theses can explain the historical reality in an adequate way. It shows that in fact on the one hand women of all social backgrounds could become a maid; but on the other hand it demonstrates that the service-especially of maids from an upper class family-in general meant a lasting disruption in a woman’s life. So, if domestic service neither was a lower classes’ phenomenon, nor an apprenticeship-like usual phase of woman’s life, how could it be interpreted?Here the author suggests interpreting it, from the coeval point of view, as a “state” ( Stand) of the house because the classification into social status resulted from the need of order and the house was thought as the base of the social order in this society. Therefore, to hire out as a maid servant meant to change one’s personal state and to come into the lowest state of the house. Especially for the maids of upper class families this seemed to be extremely hard and often they rejected this view of their personal appreciation. So, if the classification into states answered the society’s need of order, it produced new conflicts in the houses and thus disorder, because it did not-or did not anymore-fit to the self-disclosure of an important part of the servants. That’s why the house, which should have been the base of social order, played a significant role in the decomposition of the “old order”.
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