La famille britannique entre l'Inde et le Canada. Empire, classe sociale et voyage à la fin du XIXe siècle
Type de matériel :
30
Cet article aborde les expériences et les significations pour les enfants britanniques des voyages et communications dans l’empire par opposition à la vie en métropole, dans la seconde moitié du xixe siècle. Il examine deux catégories d’enfants aux trajectoires impériales différentes, l’une se déployant de l’Inde à la Grande-Bretagne, l’autre de la métropole vers le Canada. Pour les rejetons des familles britanniques liées au Raj, la résidence dans l’Empire était considérée comme un véritable problème ; dès lors les familles de la classe moyenne qui pouvaient se le permettre renvoyaient presque toujours leurs fils et filles dès leur jeune âge en métropole, malgré le coût émotionnel de ces douloureuses séparations familiales. Le courrier échangé entre parents et enfants offrait un moyen de maintenir les relations familiales à travers le temps et l’espace. En revanche, quand il s’agissait des enfants pauvres nés en Grande-Bretagne même, d’autres régions de l’empire apparaissaient comme un moyen d’échapper aux « parties les plus obscures de l’Angleterre ». Les enfants des taudis urbains britanniques étaient la cible des philanthropes « sauveurs d’enfants » qui cherchaient à « secourir » les orphelins et ceux qui étaient séparés de parents jugés – souvent injustement – cruels et immoraux. Les mêmes philanthropes plaçaient leur espoir dans l’émigration outre-mer, et notamment vers le Canada : on estimait que l’intégration de ces enfants pauvres dans la population en expansion des colons canadiens permettrait tout à la fois de secourir des êtres vulnérables et de participer à la construction de l’empire. Contrairement aux enfants de la classe moyenne qui quittaient l’Inde, les jeunes émigrants issus des classes populaires étaient supposés couper les liens avec leurs familles et communautés d’origine, décrites comme pathogènes. En dépit de leurs amples différences sociales, les deux catégories de jeunes ici examinées ont partagé une histoire de la migration d’enfant à l’échelle globale dont on attendait avec force qu’elle conduise à une vie meilleure.
This article contrasts the experiences and meanings of travel, communication, and imperial as opposed to metropolitan residence for British children in the second half of the nineteenth century. It examines two classes of children whose imperial trajectories extended from India to Britain in the first instance and from Britain to Canada in the second. For British children born into families connected with the Raj in India, imperial residence was deemed deeply problematic; middle-class families who could afford to ship sons and daughters back to Britain at early ages almost inevitably did so, despite the emotional consequences of painful family separations. Letters exchanged between parents and children provided an important means of sustaining family relationships across time and distance. But for many working-class children born in Britain itself, other parts of the empire were seen as offering an escape from “darkest England”. Children from Britain’s urban slums were targeted by philanthropic “child savers” who sought to “rescue” orphans or those taken away from parents condemned—often unfairly—as cruel or immoral. Hope lay with child emigration overseas, largely to Canada, where becoming part of an expanding population of British settlers was imagined both as a means of rescuing vulnerable individuals and as furthering the cause of empire building. Unlike the middle-class children sent away from India, young working-class emigrants were meant permanently to sever ties with their pathologized natal families and communities. Despite the vast social gulf dividing them, British children leaving India for the metropole and those leaving the metropole for Canada shared a history of global child migration-deemed crucial to a better life.
Réseaux sociaux