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Dans cet article, je retrace et discute l’itinéraire philosophique d’Axel Honneth, depuis La Lutte pour la reconnaissance jusqu’à ses récents essais Le Droit de la liberté et L’Idée du socialisme. Dans la première partie, le concept programmatique de pathologie sociale sera mis en relation avec celui de « sécularisation de la théodicée » formulé par Ernst Cassirer – à savoir, l’attribution de la responsabilité de la souffrance humaine à la société – et avec l’héritage des Lumières légué par Jean-Jacques Rousseau. Dans la deuxième partie, une fois précisée la position occupée par Honneth dans la tradition de la théorie critique francfortoise, j’aborderai ses propositions théoriques ; je distinguerai notamment deux modèles normatifs correspondant à deux phases successives de la pensée honnethienne : la lutte pour la reconnaissance d’une part, qui s’appuie sur une anthropologie formelle à valeur universelle ; et la théorie de la liberté sociale d’autre part, qui réactualise la doctrine hégélienne de l’éthicité en s’appuyant sur un modèle historique et internaliste de critique sociale reconstructive. Dans la troisième partie, je me pencherai sur la « divinisation du social » inhérente au projet d’une critique des pathologies sociales, ainsi que sur la confiance excessive qu’Honneth semble accorder à la force normative de l’intersubjectivité.

This article retraces and discusses the philosophical journey of Axel Honneth, from his groundbreaking book The Struggle for Recognition up to his recent essays Freedom’s Right and The Idea of Socialism. In the first section, I examine Honneth’s programmatic concept of social pathology in relation to Ernst Cassirer’s idea of the secularization of theodicy (i.e., the attribution of responsibility for human suffering to society) and to the Enlightenment legacy of Jean-Jacques Rousseau. In the second section, after assessing Honneth’s position in the tradition of critical theory, I analyze his philosophical views, identifying two different theoretical frameworks in Honneth’s work: on one hand, the theory of the struggle for recognition; on the other hand, the more recent theory of social freedom. While the first is grounded in a formal and allegedly universal anthropology, the second draws upon the Hegelian doctrine of the ethical life and develops a historicist and internalist model of reconstructive social critique. Finally, in the third section, I critically address the “divinization of the social” entailed by Honneth’s project of a critique of social pathologies, and argue that Honneth seems to place excessive trust in the normative power of intersubjectivity.