Les limites de l’interprétation : une lecture de « L’arrogance » de Bion
Type de matériel :
69
À le re-lire aujourd’hui, « L’arrogance », un bref article que Bion rédigea en 1958, révèle son extraordinaire actualité. Il peut être à la fois considéré comme un commentaire de l’ Œdipe-Roi de Sophocle et comme un essai sur la psychanalyse comme « maladie ». Dans les deux cas, on y retrouve au centre la triade curiosité-stupidité-arrogance qui veut que la vérité soit connue « coûte que coûte ». Dans cet article, Bion redéfinit le crime d’Œdipe (et donc de la psychanalyse) par rapport à une pulsion épistémophilique et non plus sexuelle ; il dénonce l’attitude objectivante de l’analyste et révolutionne la compréhension des réactions thérapeutiques négatives. La « psychose » de l’analyste (ou celle de la psychanalyse) trouve son expression dans le phénomène de vouloir devenir psychanalyste, dans l’aspiration à être « scientifique » (par opposition à obtenir une compréhension « herméneutique »), à vouloir dire au patient ce qu’il croit être la vérité, et finalement à « mépriser » ses patients et ses collègues. Anticipant les thèmes de Transformations et d’ Un mémoire du temps à venir, « L’arrogance » pose les bases d’une critique convaincante de l’idéologie psychanalytique et d’une refondation réellement éthique de la discipline.
Réseaux sociaux