Quel « Soi » et quel « Autre » ? Une étude de la construction discursive de l’appartenance dans les manuels d’histoire français et allemands
Type de matériel :
50
Cet article porte sur la construction de « Soi » et de « l’Autre » européen dans les chapitres traitant de la Première Guerre mondiale dans onze manuels scolaires d’histoire français et allemands récents. Dans le cadre de l’« analyse du discours contrastive » et en fondant l’étude sur un relevé de procédés discursifs (explicites ou non), on montre que les manuels français s’efforcent de construire un Soi européen en effaçant les belligérants du discours, mais qu’ils n’y parviennent pas entièrement et que l’Autre – toujours allemand – fait régulièrement surface et est alors construit comme unique acteur de la guerre. Le Soi des manuels allemands est l’Allemagne, sans que ce ne soit jamais explicite : la construction d’une communauté nationale s’effectue entièrement dans le non-dit et ainsi dans l’évidence. Elle est contrebalancée par un effort constant de changement de perspective, l’élève devant apprendre à se mettre à la place de l’Autre, qui est, en l’occurrence, le non-Allemand.
This article focuses on the construction of the “Self” and “the [European] Other” in chapters dealing with the First World War in eleven recent French and German history textbooks. In the framework of “contrastive discourse analysis” and basing the study on a record of (explicit or implicit) discursive processes, it is shown that the French textbooks strive to build a European Self by erasing the enemies from the discourse. but it is shown that they do not succeed entirely and that the Other—always German—regularly surfaces and is then constructed as the sole agent of the war. The Self in German textbooks is Germany, but this is never made explicit; the construction of a national community is carried out entirely in unspoken fashion and thus in the realm of the obvious. It is counterbalanced by constant efforts to change perspective, the pupil having to learn to put himself or herself in the place of the Other, who is, in this case, the non-German.
Este artículo trata sobre la construcción del “Yo” y del “Otro” en los capítulos que abordan la Primera Guerra Mundial, en once manuales recientes de historia, franceses y alemanes. Dentro del marco del « análisis contrastivo del discurso » y en base a la observación de los procedimientos discursivos (explícitos o no), se muestra que los libros de texto franceses se esfuerzan por construir un Yo europeo suprimiendo, aunque sin lograrlo del todo, a los beligerantes del discurso y que el Otro —siempre alemán— emerge regularmente y se construye, por tanto, como el único actor en la guerra. El Yo de los libros de texto alemanes, sin que esto se explicite en ningún momento, es Alemania: la construcción de una comunidad nacional se efectúa enteramente en lo implícito y, por consiguiente, en lo evidente. Se contrarresta con un esfuerzo constante de cambio de perspectiva: el alumno debe aprender a ponerse en el lugar del Otro, en este caso, el no-alemán.
Réseaux sociaux