La Tunisie après vingt ans de crise de succession
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Dans la période qui suit la mise à l’écart du « Combattant suprême », de nombreux observateurs sont inquiets sur l’avenir d’une société qui souffre de crises multiples. Mais ce sentiment est probablement dû à une vision trop sommaire selon laquelle, à une Tunisie bourguibiste organisée et volontariste, puis à un bourguibisme déclinant, devait succéder un post-bourguibisme en crise. D’autres processus sont en réalité à l’œuvre. Un premier exemple est celui du plan de redressement économique. Elaboré par le gouvernement Mzali, il s’oriente dans le long terme vers l’économie libérale et ouverte au commerce international, et dans le court terme vers la restructuration et le désengagement de l’Etat vis-à-vis des entreprises publiques ; cela implique en priorité la réforme du système bancaire et, par suite, la nécessité pour les banques d’opérer de délicats ajustements, face aux demandes des sociétés en difficulté. Mais cela nécessite aussi une politique des prix et un allègement des subventions aux produits de base qui risquent d’entraîner de nouveau des troubles sociaux, la politique de restructuration macro-économique - objectif du plan 1987-1991 – pouvant tout au plus permettre un ralentissement du taux de croissance du chômage. Un second exemple concerne le renouvellement du parti destourien et sa capacité à canaliser le ressentiment croissant des masses. En dépit de l’action constante de H. Bourguiba pour contrôler totalement le parti en empêchant toute structuration autonome, la direction a cherché depuis 1984 à renouveler les échelons locaux. La machine partisane a certes vu diminuer son emprise, et elle est apparemment impuissante à démobiliser l’islamisme ; elle reste néanmoins en mesure de gagner facilement d’éventuelles élections libres. Les prévisions pessimistes ne tiennent peut-être pas suffisamment compte du possible succès du plan de redressement et du maintien de structures politiques qu’occultait le pouvoir personnel.
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