Étude du rôle des indicateurs et de l’expertise nationale dans la reconfiguration de la production urbaine
Type de matériel :
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Cet article propose d’analyser la place et le rôle des instruments de l’action publique développés à partir de données territoriales dans un contexte de reconfiguration des modes d’exercice de l’aménagement urbain des métropoles françaises. La récente loi Climat et résilience de 2021 et son décret d’application paru l’année suivante ont donné lieu à une controverse concernant les types d’affectation des sols aux statuts « artificialisé » ou « non artificialisé ». Les enjeux liés à la définition du phénomène d’artificialisation se traduisent dans les débats sur la construction sociale et politique de son indicateur de mesure, qui prend la forme d’une nomenclature jointe à une base de données géographiques à destination des acteurs publics locaux. Outre l’imposition implicite d’un modèle d’aménagement descendant, l’oscillation entre un énoncé conventionnel et réaliste du phénomène d’artificialisation soulève la question de l’incidence de la classification sur les modes de production urbaine et la manière dont les acteurs locaux problématisent les enjeux de l’aménagement. L’indicateur de mesure constitue un outil de comptabilisation pour contrôler les objectifs fixés par le législateur, mais apparaît insuffisant pour régler le problème de l’artificialisation. En nous appuyant sur le cas de la métropole de Toulouse, nous montrons que les acteurs locaux sont tributaires du modèle d’aménagement stabilisé dans l’indicateur de mesure de l’artificialisation produit par le travail d’expertise national (ministère de la Transition écologique). Ils se trouvent ainsi contraints de réunir des ressources d’expertise supplémentaires qu’ils doivent conjuguer à une implication politique locale forte afin de maitriser l’urbanisation de leur territoire.
This article proposes to analyze the place and role of public action instruments developed from territorial data in a context of reconfiguration of urban planning practices in French metropolises. The recent Climate and Resilience Act of 2021 and its implementation decree issued the following year have given rise to a controversy concerning the types of land use with “artificial” or “non-artificial” status. The issues related to the definition of the phenomenon of artificialization are reflected in the debates on the social and political construction of its measurement indicator, which takes the form of a nomenclature attached to a geographic database for use by local public actors. In addition to the implicit imposition of a top-down planning model, the oscillation between a conventional and realistic statement of the phenomenon of artificialization raises the question of the impact of the classification on urban production methods and the way in which local actors problematize planning issues. The measurement indicator constitutes an accounting tool for monitoring the objectives set by the lawmakers but it does not appear to be sufficient to solve the problem of artificialization. Based on the case of the Toulouse metropolitan area, we show that local players are dependent on the planning model stabilised in the indicator for measuring artificialisation produced by the national expert body (Ministry of Ecological Transition). They are thus obliged to gather additional resources of expertise that they must combine with a strong political involvement in order to control the urbanization of their territory.
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