Le mariage paysan russe au XIXe siècle
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Résumé Au xix e siècle, la famille russe est insérée dans un cadre institutionnel et social spécifique, très différent de celui observé en Europe occidentale. Les contraintes qui encadrent et modèlent la formation des familles, et notamment le mariage, sont très fortes et de nature diverse : elles relèvent à la fois du servage et du pouvoir du propriétaire foncier qui lui est associé, des interdits de parenté et des interdits religieux, et du contrôle exercé par la communauté rurale. Une partie d’entre elles disparaît brutalement en 1861, avec l’abolition du servage, qui limitait très fortement la possibilité de choisir son conjoint à l’extérieur du domaine du propriétaire foncier. À partir des informations contenues dans les révisions (dénombrements fiscaux) et les registres paroissiaux, cet article analyse les pratiques matrimoniales des paysans serfs du comte Cheremetev avant 1861, dans trois villages russes proches de Moscou appartenant au domaine de ce comte, et les premières transformations postérieures à la réforme. Si l’abolition du servage conduit notamment à une augmentation des migrations matrimoniales, d’autres spécificités comme le caractère patrilocal du mariage perdurent, témoignant d’un ancrage anthropologique profond de certaines pratiques matrimoniales.
During the nineteenth century, the Russian family existed within a particular institutional and social context, very different from that of Western Europe. The constraints surrounding and shaping family formation, and especially marriage, were very strong and diverse in nature. They arose jointly from serfdom and the landowner’s power associated with it, from kinship prohibitions and religious interdictions, and from the power held by the rural community. One of these elements disappeared abruptly in 1861, with the abolition of serfdom, which had imposed severe limitations on the possibility of choosing a spouse outside the landowner’s estate. Using information contained in the revision lists (taxation counts) and parish registers, this article analyses marriage practices among Count Sheremetev’s peasant serfs before 1861, as well as the first transformations following reform, in three Russian villages near Moscow belonging to this Count’s estate. Although the abolition of serfdom led in particular to an increase in marital migrations, other characteristics such as marriage’s patrilocal nature remained unchanged, testifying to the deep cultural roots of particular marriage practices.
Resumen Durante el siglo xix, la familia rusa formaba parte de un marco institucional y social específico, muy distinto del observado en Europa Occidental. Las fuerzas que enmarcaban y modelaban la formación de familias, y en particular el matrimonio, eran importantes y diversas: provenían a la vez del vasallaje y del terrateniente bajo el dominio del cual vivían, de las normas de parentesco y de las normas religiosas así como del control que ejercía la comunidad rural. Parte de estas restricciones desapareció repentinamente en 1861, con la abolición del vasallaje, que restringía fuertemente la posibilidad de escoger un cónyuge fuera del dominio del terrateniente. A través de los datos contenidos en las revisiones (enumeraciones fiscales) y en los registros parroquiales, este artículo analiza las pautas matrimoniales de los campesinos siervos del conde Cheremetev antes de 1861 en tres pueblos rusos cercanos a Moscú bajo el dominio del conde, y las primeras transformaciones posteriores a la reforma. Si bien la abolición del vasallaje condujo a un aumento de las migraciones matrimoniales, ciertas características tales como el carácter parroquial del matrimonio perduraron, lo cual revela el fuerte arraigo antropológico de ciertas prácticas matrimoniales.
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