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La transformation graduelle de la Grèce actuelle en une sorte de Sahel européen n’a aucun précédent dans un pays développé en période de paix. En effet, la crise semble toucher les fondements mêmes de la structure sociale. Il faut donc se poser la question des facteurs concrets qui sous-tendent l’émergence de cette situation exceptionnelle. Il s’agit d’une coïncidence insolite d’éléments disparates qui tiennent aussi bien au développement historique des structures internes et à la conjoncture internationale. Malgré l’insertion graduelle du pays dans la communauté européenne, le capitalisme grec n’a jamais pu évoluer sur une base productive efficace. Dans ces conditions donc, il est normal que les effets de la crise mondiale aient été ressentis de manière encore plus brutale qu’ailleurs. En effet, la compétitivité devrait être restituée par le biais d’une « dévaluation intérieure » massive. Ce qui équivaut à une chute brutale du niveau de vie de la grande majorité de la population et, par conséquent, à la mise en place d’une situation sociale explosive et potentiellement incontrôlable. A cet égard donc, on devrait se poser la question des raisons qui sous-tendent ces options catastrophiques. On ne peut pas exclure qu’au fond la doctrine de la dévaluation intérieure ne soit que le préambule expérimental de la mise en chantier d’une nouvelle stratégie du capital international. L’examen « clinique » des seuils de la résistance politique d’un peuple rendu à la misère pourrait fournir des indices en ce qui concerne les limites systémiques de la redistribution de la richesse sociale en faveur du capital.

The gradual transformation of Greece into a kind of a European Sahel has no precedent in European peacetime history. As the crisis appears to touch the very foundations of the social structure, one must examine the specific factors lying underneath the emergence of this exceptional situation. This is an unusual coincidence of disparate elements which also goes a long way towards explaining the historical development of both internal structures as well as the international conjuncture. Despite its gradual insertion into the European Community, Greek capitalism was never able to develop an effective productive base whilst the country’s entry into the Eurozone ruled out the option of devaluing the currency. As a result, competitiveness had to be regained by a massive “internal devaluation”, entailing brutal cuts in the living standards of the great mass of the population: a state of affairs that is both socially explosive and potentially uncontrollable. Reflecting on the causes of this catastrophic route, one cannot exclude the possibility that behind the doctrine of the internal devaluation we are witnessing the experimental preface of a new strategy of international capital. The clinical experiment carried out in the face of the political resistance of a people reduced to misery could well provide indications on the systemic limits of redistributing social wealth in favor of capital.