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La collecte de données sur les personnes, les organisations et les choses et leur transformation en une forme de capital est souvent décrite comme un processus d’« accumulation par dépossession », une perte généralisée de droits renforcée par des pratiques prédatrices et la violence juridique. Pourtant, cet argument ne cadre pas avec le fait que l’inscription dans les systèmes numériques est souvent vécue (et présentée par les entreprises) comme un processus beaucoup plus bénin : s’inscrire à un service « gratuit », répondre à l’invitation d’un « ami » ou être encouragé à « partager » du contenu. Dans cet article, nous nous concentrons sur le rôle central du don et de la réciprocité dans le modèle commercial et l’imaginaire culturel du capitalisme numérique. Nous suggérons que la relation économique qui se développe à la suite d’une offre de cadeau numérique ne masque pas seulement l’asymétrie structurelle entre le donneur et le receveur, mais permet également la création d’une nouvelle marchandise, les données personnelles, obscurcit sa véritable valeur et naturalise son appropriation privée. Nous appelons ce régime unique « l’accumulation par le don ».

The harvesting of data about people, organizations, and things and their transformation into a form of capital is often described as a process of « accumulation by dispossession », a pervasive loss of rights buttressed by predatory practices and legal violence. Yet this argument does not square well with the fact that enrollment into digital systems is often experienced (and presented by companies) as a much more benign process : signing up for a « free » service, responding to a « friend’s » invitation, or being encouraged to « share » content. In this paper, we focus on the centrality of gifting and reciprocity to the business model and cultural imagination of digital capitalism. We suggest that the economic relation that develops as a result of a digital gift offering not only masks the structural asymmetry between giver and gifted but also permits the creation of the new commodity of personal data, obfuscates its true value, and naturalizes its private appropriation. We call this unique regime « accumulation by gift ».