Émotions, liens affectifs et pratiques de soin en contexte de conflit armé
Type de matériel :
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Se situant à la croisée de la sociologie de l’engagement et de la sociologie des relations de soin et prenant appui sur un travail d’observation ethnographique à l’hôpital militaire de Kharkiv, au plus près des bénévoles de l’association Sœur de la miséricorde ATO/Kharkiv, l’article appréhende les ressorts de l’implication des femmes ukrainiennes, à l’arrière du conflit armé dans le Donbass, dans l’assistance aux soldats malades ou blessés. Il montre comment ce bénévolat émerge d’une rencontre singulière entre les expériences quotidiennes, émotionnelles, affectives, sentimentales, de ces femmes à l’arrière-front et leurs caractéristiques socio-biographiques. Une attention particulière aux pratiques du savoir-soigner profane auxquels cet engagement-là donne lieu met en exergue des attachements qui se nouent dans le soin entre ces pourvoyeuses d’aide, mais surtout entre celles-ci et les militaires aidés. L’intensité affective de ce faire ensemble, ainsi qu’un recoupement qu’il opère entre cercles de sociabilités, vie amoureuse et familiale, travail bénévole quotidien, rendent difficile pour ces femmes toute perspective de démobilisation tant que le conflit armé perdure, ceci malgré une marginalisation professionnelle et financière à laquelle leur engagement les expose.
The sociology of commitment and the sociology of care, as well as ethnographic research methods, are combined to draw from the fieldwork accomplished at the military hospital in Kharkiv with volunteers of the association Sister of Mercy ATO/Kharkiv. Why have Ukrainian women, at the rear of the armed conflict in Donbas, volunteered to care for wounded or sick soldiers? Their commitment to volunteering has arisen out of the encounter between everyday emotional, affective and sentimental experiences and their sociological and biographical characteristics. Thanks to a particular attention paid to practices of their profane caregiving, light is also shed on the ties created among the care-givers themselves and, too, between them and hospitalized soldiers. The affective intensity of this experience (which extends to circles of sociability, love, family life and volunteer activities) makes it hard for these women to imagine being demobilized as long as the conflict continues, despite the occupational and financial “marginalization” to which their commitment exposes them.
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