Sexualité et défiguration : des théories médicales du XIXe aux théories sexuelles infantiles de la psychanalyse
Type de matériel :
79
La littérature médicale du début du XIXe siècle établissait de façon récurrente un lien entre anatomie et préférences sexuelles. Selon nombre de médecins de cette époque, l’idée de la défiguration corporelle était articulée à des pratiques sexuelles déviantes. Elle était tantôt envisagée comme la cause des désirs interdits, tantôt comme la conséquence physique visible des rapports sexuels illicites. Ces conceptions historiques du corps et du sexe peuvent-elles apporter un éclairage sur certaines expériences recueillies dans la clinique analytique ? Tel est le pari de cet article. En effet, dès lors qu’elles se réfèrent aux désirs refoulés, du moins socialement, ces théorisations anatomo-pathologiques peuvent fonctionner comme un terrain privilégié pour le déploiement des fantasmes inconscients. Chez les médecins du XIXe siècle, l’idée de la défiguration venait rendre visibles les traces des pratiques sexuelles qui devaient rester invisibles en société (masturbation, pédérastie et saphisme). De la même manière, certaines situations cliniques laisseraient penser que le fantasme de défiguration vient donner une forme corporelle à des positions psychiques angoissantes, de par leur contenu sexuel refoulé. Comme si, afin d’être circonscrits et contenus, l’excès et le désordre pulsionnels du retour du refoulé appelaient la construction psychique d’une figure du corps.
What relationships exist between sexuality and the body images? Medical literature of the early 19th century repeatedly established a link between sexual practices and morphology, between physical attraction and anatomical differences. According to the illustrious doctors of this period, the idea of corporeal disfiguration was often connected to deviant sexual practices. Disfiguration was sometimes imagined as the cause of forbidden desires or the visible physiological consequence of illicit sexual relations. It was as if the so-called “normal” body corresponded to the so-called “normal” sexual practices and vice versa. The deformed body would therefore reflect sexuality which was abnormal, repressed and ungraspable. Can these historical conceptions of the body and sex cast light on certain experiences we encounter in psychoanalytic practice today? That is the goal of this article; in both cases, the image of disfiguration may constitute a bodily figure able to include the excess, strangeness and infraction proper to unconscious sexuality.
Réseaux sociaux