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La théorie fiscale constitue la clef du programme physiocratique. Ce sera d’ailleurs, dès les premiers textes, un des thèmes majeurs de l’École et le fameux Tableau économique de Quesnay constitue aux yeux de ses disciples la justification essentielle de leur projet de réforme des impôts. L’objectif est le remplacement de tous les prélèvements par un impôt unique sur le produit net prélevé sur les propriétaires, mais l’analyse précise des thèses des physiocrates et de leurs alliés amène à nuancer l’idée courante d’un strict monolithisme:d’une part,les impôts indirects sont toujours au premier rang de leurs critiques,mais tous oscillent entre la position théorique tranchée de l’impôt unique et une attitude plus pragmatique.Ensuite,la justification du principe de l’imposition est toujours affirmée,mais tantôt c’est une justification par le «marché» fictif passé entre le souverain et les sujets,tantôt par référence à une «copropriété» du souverain sur toutes les terres.Enfin, pour compliquer encore l’analyse,il faut ajouter que les controverses sur la fiscalité constituent toujours un domaine extrêmement «sensible» pour le pouvoir royal.Pour s’aventurer sur ce terrain brûlant,il faut donc faire montre d’une grande prudence,voire adopter un double langage. À cet égard, il est utile de comparer les textes des ténors de la physiocratie et la pratique du seul ministre qu’ils considèrent comme leur disciple:Turgot.Si,dans ce domaine tout au moins,sa position est invariablement d’une parfaite orthodoxie physiocratique, ses critiques portent sur les modalités pratiques de mise en oeuvre des réformes,sujet où il pouvait faire valoir ses incontestables qualités d’administrateur.

The fiscal theory constitutes the key aspect of the Physiocratic program.From its onset it is one of the major themes of this school.In addition,Quesnay’s famous “Tableau économique”is,for his followers,the best way to justify their tax reform project. As we know,the objective of this program is to replace all the deductions by a single tax on the net product raised from the landlords,but an analysis of the Physiocrats’theses (as well as the ones of their allies) leads us to question the received idea of a strict doctrine: – The indirect taxes are always their main objects of criticism,but Physiocrats oscillate between the radical theoretical position of a single tax and a more pragmatic attitude towards taxation. – The taxation principle is always the touchstone of their reform project,but sometimes it is justified through the fictive deal made between the sovereign and his subjects,while other times it is referred to as a form of “co-ownership”of the sovereign over all the lands. – To make the analysis even more complex,it is important to point out that the controversies over taxation have always been a contentious topic for the sovereign power.To be able to navigate through this mined field,Physiocrats had to be extremely careful and even adopt a doublespeak. In this regard,it is useful to compare the texts of the leaders of the Physiocratic movement and the actual practice of the only minister that they consider to be their disciple:Turgot.If his position was in line with the Physiocratic viewpoint,he criticized the practical modalities by which the reforms could be implemented,a critique for which he could rely on his unquestionable qualities of administrator.