Contre les « tyrans ». Luttes judiciaires et troubles anti-seigneuriaux en Calabre au XVIIIe siècle
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L’avènement de Charles de Bourbon au trône napolitain en 1734 encouragea des projets visant à limiter la puissance du baronnage et à améliorer le système fiscal, dont la base était constituée par les communes du Royaume. Le choix de la voie judiciaire pour poursuivre ces objectifs amena le gouvernement à rechercher le soutien des communautés, qui furent incitées à multiplier les recours en justice : beaucoup de populations des provinces essayèrent d’exhumer les anciens droits et biens communaux, et parfois arrivèrent jusqu’à remettre en question certains aspects de la domination féodale. Au début, la monarchie tendit à soutenir les recours des communes, mais souvent elle finit par céder aux pressions des aristocrates, dont l’appui était nécessaire pour gouverner le Royaume. Quelques communautés, déçues par les incertitudes des batailles judiciaires, n’hésitèrent pas à avoir recours à la force. L’analyse des protestations dont quatre villages/villes calabrais furent les protagonistes permet d’examiner le passage de la médiation judiciaire à la résistance ouverte, faisant ressortir la nature franchement conflictuelle des procédures des années 1730. En outre, cette analyse essaye de mettre en lumière les recompositions des alliances et des clivages traditionnels favorisées par l’intensification des conflits et par l’importance de leurs enjeux. Enfin, l’étude de l’interaction avec le pouvoir central met en lumière la mobilisation politique qui se produisit au sein des communautés et qui amena à une formulation des revendications paysannes suivant le langage politique et judiciaire.
Legal actions and anti-feudal riots in 18th Century Calabria Charles of Bourbon’s accession to the Neapolitan throne in 1734 gave rise to several plans to reform the Kingdom, most of which were aimed at limiting feudatories’ excess of power and at correcting the fiscal system. Having chosen a “judiciary way” to pursue these aims, the government was led to involve rural communities into the campaign against the feudal landlords. Hence, countryside populations were urged to revive old rights and to recover customary common goods : some of them went so far as to challenge some aspects of the feudal rule. But in the end the monarchy, afraid of the turn that the conflict was taking in some towns, yielded to aristocrats’ pressures and often left the communities down. Some of them, disappointed, resorted to violence. By focusing on the struggle developments in four towns/villages, and on the frequent shifts from trials to riots, the article assesses the contentious nature of the legal procedures of the 1730s. Moreover, it shows how the fight against landlords brought about some changes within the local communities’ parties and factions. Lastly, it tries to highlight some hints of politicization in the countryside : being encouraged to bring legal actions, peasant communities were led to formulate their claims and grievances in compliance with political and judicial language.
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