L'évolution du principe de liberté d'établissement en droit communautaire : un mouvement de libéralisation depuis l'arrêt Cartesio
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Le principe de la liberté d’établissement donne aux sociétés établies dans les différents États membres de l’Union européenne la possibilité de développer leurs activités transfrontalières. Une fois le principe consacré par le Traité de Rome, aucune règle de droit communautaire sur la reconnaissance des sociétés susceptible de mettre en œuvre cette liberté ne fut édictée. Les textes se sont limités à prévoir un renvoi aux droits nationaux et ont établi un principe de neutralité par rapport aux systèmes de rattachement des États membres. Ces derniers ont recours à deux critères de rattachement différents : la théorie du siège réel ou celle du siège statutaire, ce qui génère des difficultés d’application de la liberté d’établissement. Les problèmes se posent non seulement dans le cadre du transfert de siège, mais également dans la création ex nihilo d’un établissement secondaire. Il est donc revenu au juge communautaire de préciser les modalités d’application de la liberté d’établissement au cours des deux dernières décennies. Dans un premier temps, les juges de Luxembourg ont laissé une marge de manœuvre aux États membres. Puis la Cour de justice s’est engagée vers plus de libéralisme en rappelant régulièrement que les règles nationales ne devaient pas constituer une entrave à l’exercice de la liberté d’établissement. En 2008, l’arrêt Cartesio est allé plus loin en affirmant le droit pour une société qui changeait de loi applicable de transférer son siège dans un autre État sans dissolution ni liquidation préalable. Cela a permis d’étendre la liberté d’établissement pour les sociétés migrantes. Un certain équilibre entre le droit international privé des États membres et l’exercice de la liberté d’établissement a donc été trouvé. Mais l’absence de règles communautaires uniformes et la coexistence de règles nationales divergentes ont engendré un law shopping au sein de l’Union européenne et un contentieux sur les conditions de mise en œuvre de cette liberté entre les pays d’origine et d’accueil.
THE EVOLUTION OF THE PRINCIPLE OF FREEDOM OF ESTABLISHMENT IN COMMUNITY LAW : A MOVEMENT OF LIBERALIZATION SINCE THE CARTESIO RULING The principle of the freedom of establishment gives companies established in the various Member states of the European Union the possibility to develop their cross-border activities. After the principle was enshrined by the Treaty of Rome, no secondary law on the recognition of companies was enacted to implement this freedom. Texts were limited to planning references to national laws and established a principle of neutrality with regard to the connecting systems of Member states. The latter boils down to two different connecting factors : the « real seat » theory and the « incorporation » theory, which generate difficulties for the application of the freedom of establishment. Problems arise not only within the context of transfers of the company’s seat, but also in the creation ex nihilo of a secondary establishment. Over the last two decades, it has been left to the community judge to specify the modalities of application of the freedom of establishment. At first, the judges in Luxembourg gave Member states a certain amount of flexibility. However, the Court of Justice then committed to greater liberalism by regularly recalling that national rules should not create an obstacle to the exercise of the freedom of establishment. In 2008, the Cartesio ruling went further by asserting the right for a company changing the applicable law to transfer its seat to another State without the need for dissolution or preliminary liquidation. This has extended the freedom of establishment for migrant companies. A balance between the private international law of Member states and exercise of freedom of establishment was thereby created, but the absence of uniformity in community rules and the coexistence of divergent national rules have engendered law shopping within the European Union and disputes around the conditions for implementation of this freedom between countries of origin and host countries.
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