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Cet article cherche à étayer l’hypothèse selon laquelle les grandes lignes de la pensée husserlienne de la crise de l’Europe ainsi que la philosophie téléologique de l’histoire, qui l’accompagne dans ses célèbres textes des années 30, s’enracinent à plusieurs titres dans l’expérience de la Première Guerre mondiale. Après un bref rappel biographique, l’article s’appuie tout d’abord sur la prégnance de la figure de Fichte aux yeux de Husserl, pour montrer que son patriotisme est plus éthique que politique et qu’il est compatible comme tel avec un cosmopolitisme dans le cadre d’une téléologie personnelle et supra-personnelle de la vocation où la guerre fait elle-même figure de crise. Puis il reconstruit l’émergence, dans les années de guerre, de deux éléments conceptuels essentiels à la conception husserlienne d’une crise de l’Europe : la phénoménologie génétique et l’idée d’une logique du monde, qui donnent respectivement à la subjectivité et à la théorie de la science un horizon historique.

This article intends to support the hypothesis that the outline of Husserl’s famous conception of the european crisis and the teleological philosophy of history that goes with it are rooted in several ways in his experience of the First World War. After a short biographical recall, the article relies primarily on the significance of Fichte in the eyes of Husserl to show that his patriotism is ethical rather than political, and compatible as such with cosmopolitanism in a personal and supra-personal teleology of vocation in which the war itself is the crisis. It then reconstructs and follows the development, in the war years, of two key elements in Husserl’s later conception of the european crisis : genetic phenomenology and the idea of a world-logic, which respectively give the subjectivity and epistemology a historical horizon.