Éléments de discussion sur « l’espace de discussion dans/sur le travail »
Type de matériel :
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L’article critique dans la notion d’« espaces de discussion sur le travail » l’absence d’une perspective explicite sur le langage, laissant croire qu’il est possible d’accéder au travail réel sur la base d’un « échange d’opinions ». À cette conception prônée dans un document de référence de l’Anact, et donc répandue par le biais méthodologique, l’auteur oppose la nécessité de penser le langage comme un échange entre des subjectivités. C’est à cette condition qu’il peut y avoir un lien entre ce qui se dit du travail et ce qui s’y fait réellement. Si l’on n’ancre pas la discussion sur le travail dans le travail tel qu’il se réalise, prenant le temps de l’analyse et de son partage, les « espaces de discussion » deviennent des endroits où ne peuvent se discuter que les questions autorisées et les problèmes qui ne fâchent personne, surtout pas le management. A contrario, l’affirmation d’une volonté de discussion suppose de sortir d’une définition a priori de ce qu’il y a à discuter. Si l’on est conséquent avec l’idée que l’écoute du travail réel, et donc de ceux et celles qui le font, est aujourd’hui un objet manquant, on ne peut pas limiter le chemin que va parcourir une question née d’une situation de travail. Si les espaces de discussion servent à inculquer l’idée inverse, ces espaces au pis sont nocifs, au plus probable rejoindront d’autres tentatives aujourd’hui diluées. Le risque n’est pas qu’ils égarent durablement leur monde, il est plutôt que, à force, on perde confiance dans tout espoir et toute tentative de discussion.
The article offers a critical study of the notion of « workplace discussion spaces » [espaces de discussion dans/sur le travail] for their lack of an explicit account of language, as if it were possible to access workplace realities on the basis of an “exchange of opinions.” Such a conception is extolled in a resource paper by Anact (« Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail », or National Agency for Improving Workplace Conditions), which is rife with methodological bias. Against this conception of language, the author argues for the necessity of understanding language as an exchange between subjectivities. Only on this condition can there be a link between what is said about work and what actually happens there. If workplace discussion spaces are not grounded in work as it happens, if there is no time to analyze and share analyses, then conversation at the « workplace discussion spaces » gets limited to preauthorized questions and problems that upset no one (above all, not the management). Nevertheless, to affirm a will to talk implies going beyond any a priori definition of what there is to talk about. If one takes seriously the idea that we do not currently listen to workplace realities, nor to those who do the work, it follows that one cannot limit the scope of the questions that may emerge from workplace situations. If workplace discussion spaces serve to inculcate the opposite idea, at worst these spaces are harmful, and most probably will only end-up as other watered-down endeavors. The risk is not that they will durably lead people astray ; it is rather that, ultimately, people will lose confidence in any hope or attempt to hold an actual discussion.
El artículo critica la noción de « espacios de discusión sobre el trabajo » debido a la ausencia de una perspectiva explícita acerca del lenguaje, dejando creer que es posible acceder al trabajo real sobre la base de un « intercambio de opiniones ». A esta concepción propuesta en un documento de referencia de la Anact (En Francia, la Agencia Nacional para la Mejora de Condiciones de Trabajo), y por ende difundido por su inclinación metodológica, el autor opone la necesidad de pensar el lenguaje como un intercambio entre subjetividades. Solo a condición de que eso ocurra puede haber una relación entre lo que se dice del trabajo y lo que se hace realmente. Si la discusión no se ancla en el trabajo tal como se realiza, tomando el tiempo del análisis y de compartirlo, los « espacios de discusión » se vuelven espacios en los cuales solo se puede hablar de las cuestiones autorizadas y de los problemas que no molestan a nadie, sobre todo al management. A contrario, afirmar una voluntad de discusión supone salirse de una definición a priori de qué hay que hablar. Si se es consecuente con la idea de que la escucha del trabajo real, y por rende de quienes lo llevan a cabo, es hoy en día un objeto faltante, no es posible limitar el camino que va a recorrer una pregunta que nace de una situación de trabajo. Si los espacios de discusión sirven a inculcar la idea inversa, en el peor de los casos esos espacios serán nocivos, y lo más probable es que se sumen a otras de las tentativas que se encuentran hoy en día diluidas. El riesgo no es que se pierdan de manera durable de su mundo, sino que, finalmente, se pierda la confianza en toda esperanza y toda tentativa de discusión.
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