Lecler, Romain
Une diversité sur mesure
- 2017.
53
Il existe toute une diplomatie marchande française de la diversité culturelle qui consiste à accompagner, tout au long de leur trajectoire, des films d’auteurs étrangers issus de pays aux cinématographies dominées, dits du « Sud » : coproductions avec des professionnels français, repérage et suivi par des diplomates spécialisés, aides et financements, sélection et récompenses en festival, distribution dans les salles françaises d’art et essai et, pour finir, ventes à l’étranger. Pourtant, loin de rééquilibrer les inégalités mondiales en matière de production, ce type de soutien les conforte. Il permet, certes, à des cinéastes du « Sud » de s’exprimer, mais à travers tout un processus de normalisation analysé à partir du Fonds Sud, qui a soutenu 484 films entre 1984 et 2011. Quelle que soit l’origine du film, il s’agit toujours de raconter une histoire ancrée dans une réalité quotidienne, de documenter sur la réalité politique d’un pays et de mobiliser un registre plus universel du symbolique et de l’émotion. Au sein de la commission du fonds, il y a consensus sur les critères de sélection des projets. On attend d’eux d’être « authentiques », c’est-à-dire de faire preuve de clarté, vraisemblance, sincérité, originalité et pertinence dans la présentation d’une réalité sociale, politique et historique d’un pays du « Sud ». Au fond, il s’agit toujours de divertir et cultiver un public du « Nord » qui est celui des festivals internationaux et des salles d’art et essai. A Tailor-made Diversity. Conditioning a Cinema from the South A French commercial diplomacy of cultural diversity supports movies by foreign authors coming from cinematographically dominated countries (also referred to as “from the South”). It does so all along their trajectories: When they are coproduced by French professionals, spotted and monitored by specialized diplomats, financially supported and funded, selected and awarded in film festivals, distributed in French art movie theaters, and – finally – exported abroad. Nonetheless, far from compensating for global inequalities in terms of film production, this type of support reinforces them. While it allows moviemakers from the South to express themselves, it submits them to a conditioning process that we analyze by focusing on the Fonds Sud, which financed 484 movies from 1984 to 2011. Wherever the movies come from, they are constantly required to tell a story anchored in the everyday reality, to document the political situation of its country of origin, and to appeal to the more universal dimensions of consciousness and emotions. Within the Fonds Sud committee, one finds a consensus on selection criteria: the movies have to be “authentic,” meaning they must be clear, plausible, sincere, original, and relevant when presenting the social, political, and historical reality of a country from the “South.” Eventually, they are expected to entertain and season an audience from the “North” – the one of international festivals and art movie theaters.