Blanco, Mercedes
Les raisons de la jouissance chez Thérèse d'Avila
- 2007.
13
RésuméLes écrits de Thérèse d’Avila doivent leur retentissement au témoignage qu’ils portent d’une « jouissance » dont la nature, l’objet, la légitimité posent le problème central qui motive le fait même d’écrire. Le témoignage est convaincant parce que Thérèse n’écrit à propos de la jouissance et de l’extase qu’en négociant avec la raison et avec la loi. En vertu d’une raison politique, le discours « mystique » se prête à une instrumentalisation par la politique confessionnelle de l’Église catholique. En second lieu, l’écriture tend à établir une raison ou proportion, aussi nette qu’elle est problématique, entre la pratique de l’ascèse et l’avènement de la jouissance. Enfin, les écrits de Thérèse posent un effet apaisant de la jouissance, qui favorise l’émergence de la « liberté de l’esprit », et rend possible un usage souverain de la raison. Il n’en faut pas déduire à notre avis, comme le font certaines lectures féministes de Sainte Thérèse, que la jouissance et le discours religieux dans lequel elle s’exprime ne sont que le prétexte d’une lutte pour le pouvoir. The universal interest aroused by Teresa de Avila’s writings is due to the testimony they bear of a delightful ‘jouissance’ whose nature, object and legitimacy set the central problem that motivates the act of writing. The testimony is persuqsive because Teresa, as she wrote about ‘jouissance’and rapture, always took into account the necessity of negotiating with reason and law. From the point of view of political reason, the mystic writings provide a precious instrument for the confessional policy of the Catholic Church. On the other hand, Teresa’s works tend to set a reason or a proportion, clear although problematic, between the practice of ascesis and the advent of ‘jouissance’. Finally, they claim that ‘jouissance’, despite the troublesome anxiety it fosters in its first stages, has at length a soothing effect. Blunting the joy and grief caused by life’s events, the mystic union, the highest degree of ‘jouissance’, gives birth to freedom of mind and makes possible an easy and sovereign use of reason. And yet it would be misleading to believe, as do some feminists readings, that this mystic exhilaration and the religious ideology in which it expresses itself, are but a pretext for a struggle to acquire an intellectual and political power that was denied to them in other fields.