Legendre, Bérangère
La croissance du revenu des retraités en Europe peut-elle être considérée comme pro-pauvres ?
- 2011.
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Les évolutions démographiques et économiques contraignent les gouvernements européens à réformer les systèmes de pension. La contributivité de ces systèmes est accrue et les conditions d’accès des assurés à une retraite à taux plein restreintes. Ceux qui partiront en retraite dans les années à venir auront connu des aléas de carrières plus fréquents. L’environnement du marché du travail (combiné aux réformes en cours) sera par conséquent susceptible d’entraîner une hausse des inégalités à la retraite. Bien connaître les facteurs d’inégalités et les leviers d’action sur le niveau des inégalités permet d’anticiper les conséquences sociales potentielles des réformes. C’est pourquoi cet article étudie l'effet des dépenses publiques de protection sociale sur la mobilité des retraités dans l’échelle des revenus. L’effet de ces dépenses sur le niveau d’inégalité au sein de la population retraitée est analysé dans un panel de pays européens. Un probit en panel est mis en œuvre afin d’identifier les facteurs ayant un impact sur la probabilité des individus de bénéficier d’un taux de croissance du revenu supérieur à la moyenne. Par la suite, une régression visant à expliquer les coefficients de Gini nous permet de vérifier les conclusions établies grâce au modèle probit en panel. Nous constatons qu’en Allemagne, le revenu moyen des retraités les plus pauvres s’est accru plus rapidement que celui des retraités au revenu moyen, tandis que le revenu moyen des plus riches a diminué au cours des années 1990. En revanche, en Irlande, ce sont les plus riches qui semblent avoir bénéficié le plus des retombées de la forte croissance économique connue à cette période. Par ailleurs, les dépenses vieillesse des pays, en permettant aux plus pauvres de voir leur revenu s’accroître plus vite que la moyenne, peuvent être considérées comme un outil efficace de la moindre dispersion des revenus entre retraités, donc de lutte contre les inégalités. Can income growth among retirees in Europe be considered pro-poor ? Demographic and economic trends are forcing European governments to reform their pension systems. Contributions to pension schemes have been raised and eligibility criteria for a full pension tightened. People who retire in the years to come will have experienced less uniform careers. Consequently, labour market conditions (combined with the reforms under way) are likely to lead to greater inequality at retirement. If the factors of inequality and the levers for action on the level of inequality are known, it becomes possible to anticipate the potential social consequences of the reforms. This article aims to identify the impact of public spending on social protection on the income mobility of retirees. The impact of that spending on the level of inequality within the retired population is analysed through a panel of European countries. A panel probit model is used here to identify the factors influencing the probability that individuals will enjoy higher-than-average income growth. Next a regression on the Gini coefficients is performed verify the conclusions based on the panel probit model. We find that in Germany in the 1990s, the average income of the poorest retirees increased faster than that of retirees on an average income, while the average income of the richest decreased. Conversely, in Ireland, the richest seem to have benefited the most from the strong economic growth recorded over the same period. By enabling the incomes of the poorest to increase faster than average, countries’ pension spending can be considered as an effective way to reduce the income variance – and therefore inequality – between retirees.