Fredj, Claire
Encadrer la naissance dans l'Algérie coloniale. Personnels de santé et assistance à la mère et à l'enfant « indigènes » (XIXe-début du XXe siècle)
- 2012.
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En Algérie coloniale, une réflexion sur les spécificités de l’assistance obstétricale pour les femmes musulmanes émerge au xixe siècle. Elle porte sur la manière d’amener ces femmes à se faire examiner et soigner dans les structures françaises mais aussi sur la nécessité de former, selon les normes occidentales, des soignantes « indigènes » (sages-femmes, infirmières) appelées à remplacer les matrones traditionnelles ( qabla-s), rendues responsables des fortes mortalités maternelle et infantile.Les projets se succèdent à partir des années 1840. Peu aboutissent : cours dans les villes, installations de sages-femmes françaises dans les villages, consultations spéciales pour femmes et enfants. Après 1914, alors que plusieurs métiers féminins s’inventent, le gouvernement général organise un corps d’infirmières-visiteuses coloniales pour s’occuper des femmes musulmanes. Plusieurs œuvres laïques, missions féminines et sociétés de Croix-Rouge ont le même but.L’administration songe aussi de plus en plus à partir des années 1920 à former des infirmières musulmanes. Quelques-unes sont diplômées au cours des années 1930 mais leur nombre reste très limité. Réticences, manque de volonté, et surtout manque de personnel, font que l’extension des soins aux femmes et aux enfants reste laborieuse. Les vœux régulièrement répétés de former des femmes soignantes indigènes se heurtent aux réalités politiques algériennes et aux raidissements des sociétés traditionnelles face à la colonisation. During the 19th century in colonial Algeria thought was given as to the types of obstetrical help that could be given to Muslim women. The idea was to find a way to lead these women to be treated within the context of French medical practice and also to create "native" caregivers (midwives and nurses) trained in western practice to replace traditional birth helpers (qabla-s). The latter were regarded as responsible for the high rates of mother and infant mortality.Beginning in the 1840s, a series of measures were proposed (educational programs in the villages, French midwives in residence in same, special medical care for women and children) and little implemented. After 1914, in addition to local self-help organizers, the colonial administration created a visiting nurse service aimed at Muslim women. Several secular organizations and feminine religious missions, as well as the Red Cross, had similar objectives.In the 1920s, the authorities increasingly hoped to create a corps of Muslim women nurses. While a few were educated in the 1930s, their number remained quite small. Partly because of reluctance by the colonial authorities, partly because of a want of energy, but mostly because of a lack of personel, increases in care offered to women and children was very slow. The often repeated wish to increase the number of "native" caregivers was broken by Algerian political reality and the rigidities of a traditional society hardened by colonisation.