Rosso, Emmanuelle

Le portrait tardo-républicain en Gaule méridionale : essai de bilan critique - 2011.


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RésuméL’attribution à César d’un portrait masculin récemment découvert dans le Rhône est l’occasion d’étudier l’émergence du portrait marmoréen en Gaule méridionale : en dépit d’une intense et ancienne romanisation, ces témoins privilégiés de la culture figurative des élites ne sont pas attestés de façon assurée avant la décennie 40-30 av. J.-C., même dans le domaine funéraire. Néanmoins, pour cette période, la plupart des effigies marmoréennes connues ont été identifiées auparavant comme des portraits « officiels », ceux d’acteurs importants de l’histoire locale : Marius, Marc Antoine, Munatius Plancus… Or, outre le fait que ces identifications sont loin d’être assurées en raison de l’absence de parallèles probants dans la numismatique ou la statuaire, les caractéristiques stylistiques des portraits eux-mêmes invitent plutôt à y voir des copies julio-claudiennes de prototypes plus anciens. Les questions soulevées par l’attribution de plusieurs effigies gauloises à César sont plutôt d’ordre méthodologique : aucune d’entre elles ne s’insère dans l’un des deux types connus de l’iconographie du Dictateur. L’argument consistant à faire du portrait arlésien une pièce unique, réalisée de son vivant, n’est pas recevable : une datation stylistique aussi précise est impossible et l’identification devient indémontrable, d’autant plus qu’un phénomène de « visage d’époque » césarien est parfaitement attesté dans la Gaule méridionale tardo-républicaine. Enfin, à Arles même, les témoins relatifs à la figure de César sont plus qu’évanescents. Comme dans la plupart des provinces occidentales, une véritable diffusion du portrait officiel marmoréen n’aura lieu qu’à partir du début de l’époque augustéenne. The recent discovery of a male portrait in the river Rhône and its attribution to Caesar provide the opportunity to study the emergence of marble portraiture in South Gaul. Despite the early and intense romanisation of this area, these privileged records of the élite’s figurative culture are not certainly attested before the decade 40-30  bc, even in the funerary field. However, in this period most of the known marble portraits have been considered “official” portraits, of important people: Marius, Mark Antonius, Munatius Plancus, and so on. Nevertheless, these attributions are not only far away from being convincing, because of the lack of clear parallels in numismatic or statuary, their stylistic features also invite us to consider them copies of earlier Julio-Claudian prototypes. The issues suggested by the attribution to Caesar of several portraits are rather related to methodology, since none of them resemble either of the two well-known types in his iconography. The argument that an Arlesian portrait could be a unique contemporary copy is not convincing: such a precise stylistic dating is impossible to maintain and the attribution becomes unprovable, all the more so since this Caesarian “age portrait” [« Zeitgesicht »] fashion is perfectly attested in South Gaul during the late Republican period. Finally, the local evidence for Caesar are rather vague. As in most of the western provinces, a true diffusion of official marble portraiture did not begin before the start of the Augustan period.