Tyminski, Robert

Notre rapport collectif au temps durant la pandémie de Covid-19 : fins, monotonie et numérisation de l’expérience - 2022.


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La pandémie de Covid-19 a eu de nombreuses conséquences psychologiques inquiétantes, notamment une augmentation généralisée des taux de dépression, d’anxiété et de toxicomanie. Chevauchant ces catégories, d’autres effets psychiques incluent une distorsion collective de notre expérience du temps. Les démarcations traditionnelles du temps ont été suspendues ou annulées pendant la pandémie, et par conséquent, les rituels, les cérémonies et les modalités d’observation du passage du temps ont été déréglés. Les fins, les processus de deuil, le caractère éphémère de la vie, s’en sont trouvés affectés. L’auteur examine un exemple clinique de deuil non résolu chez un adolescent, qui s’est réactivé parallèlement aux nombreuses pertes imposées par les restrictions sociales et éducatives dues à la pandémie. Se souvenir est devenu problématique dans une période caractérisée par la monotonie et la numérisation d’aspects de plus en plus nombreux de la vie quotidienne. À l’échelle collective, la « continuité d’existence » – formulation empruntée à Winnicott –, est devenue précaire en raison des effets de la pandémie sur la psyché, parmi lesquels l’apparition d’une relation très troublée au temps comme expérience vécue permettant de définir notre existence. The Covid-19 pandemic has had many disturbing psychological consequences, including widespread increases in rates of depression, anxiety, and substance abuse. Overlapping these categories, other psychic effects include a collective distortion in our experience of time. Traditional demarcations of time have been suspended or overridden during the pandemic, and as a result, rituals, ceremonies, and routines for observing the passage of time have become unsettled, such as endings, mourning, and transience. The author looks at a clinical example of unresolved mourning in an adolescent boy that became re-activated in parallel to the many imposed losses brought on by the social and educational restrictions of the Covid-19 pandemic. Remembrance felt threatened during a period that has been characterized by monotony and the digitalization of ever larger aspects of daily living. Collective “going on being”, a term from Winnicott, has become fraught because of the pandemic’s effects on the psyche, one of which has been the appearance of a very troubled relationship with time as lived experience to define our existence.