Ré, Virginie
L'inconscient n'a pas d'âge
- 2013.
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Dans une société occidentale marquée par une longévité croissante de sa population, la question du vieillissement devient une préoccupation majeure tant pour les personnes et les personnels de santé que pour les pouvoirs publics. Or, parallèlement à cet allongement de la durée de vie, certains sujets connaissent une involution pathologique, notamment en cas de démence de type Alzheimer ou de syndrome apparenté. Contrairement à une idée reçue, les sujets démentifiés se prêtent bien à un travail psychique qui les aide à vivre jusqu’au bout et à remobiliser une dynamique mentale que la destruction neuronale annihile à petit feu. Même si d’aucuns assimilent la démence à une mort psychique, l’approche psychanalytique révèle la part de l’inconscient encore vive chez ces patients, qu’il faut prendre le temps de saisir dans l’évanescence. La seule limite absolue est que les capacités restantes soient suffisantes et qu’elles s’actualisent dans la parole ou dans des activités artistiques accueillies comme des éléments substitutifs de cette parole perdue ou impossible. De l’établissement délicat d’une alliance thérapeutique au recueil des prémices de l’inconscient qui se fraye, en situation de démence, des voies archaïques ou hallucinatoires de reconquête de l’objet, les tentatives d’élaboration du sujet âgé démentifié sont autant d’expériences gratifiantes où la relance du narcissisme permet à ces patients de mieux vivre jusqu’au bout et de se soutenir de l’Autre pour se supporter eux-mêmes.