Chaudier, Stéphane

Vieillir dans à la recherche du temps perdu - 2005.


62

Dans À la Recherche du temps perdu, Proust propose une poétique de la vieillesse, elle-même fondée sur la représentation d’une certaine expérience de la vieillesse. Si le romancier s’attache à décrire les signes du vieillissement avec une précision cruelle, cette peinture de la déchéance n’épargne pas le héros de La Recherche, ce double fictif de l’auteur (1re partie). La vieillesse est donc une épreuve, mais une épreuve nécessaire et salutaire. Le monde change, et nous avec lui : la vieillesse oblige à faire l’apprentissage de l’altérité, constitutive de la nature du temps (2e partie). Très tôt, l’enfant de La Recherche comprend que le monde déploie une suite infinie de métamorphoses. Altérée, vieillie, soumise au temps, la chose porte en elle le reflet de ce qu’elle fut; elle anticipe le moment où elle ne sera plus simplement contemplée mais recréée par les mots. La vieillesse est donc intégrée dans le processus de la création (3e partie). C’est pourquoi Proust conçoit la vieillesse moins comme un obstacle que comme une vertu: elle fonde un point de vue fécond sur le devenir humain; à ce titre, elle est constitutive d’une humanité qui s’appréhende elle-même dans le temps. (4e partie). AGEING IN "ALARECHERCHE DU TEMPS PERDU" In "Ala Recherche du Temps Perdu" Proust offers the poetics of old age, itself based on a certain experience of old age. Although the author seeks to depict the signs of ageing with cruel precision, the portrait does not spare the main character of the book, the author's fictional double lst part). Old age is therefore a trial but a necessary and salutary trial. The world changes and we change with it: Old age obliges us to learn about change which is part of time's nature (2nd part). The child in the book very soon discovers that the world displays a never ending range of metamorphoses. Altered, aged and subject to passing time, things still reflect what they were, anticipating the moment when they are no longer looked at but talked about. Old age is thus an integral part of the process of creation (3rd part). This is why Proust sees old age as a virtue rather than an obstacle. It sheds a positive light on the future of mankind and, as such, constitutes that part of mankind capable of self perception through time (4th part).