Pérez, Pauline

Enquête sur une polyactivité subie ? - 2016.


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L’article s’intéresse à la figure du Sujet pluriel à travers l’expérimentation de différents rapports à l’activité, à partir des résultats d’une enquête empirique auprès de ceux que l’auteur a appelés les « intermittents du travail », d’anciens cadres de la grande entreprise qui ont rompu avec un mode de travail traditionnel au profit d’une meilleure qualité de vie, faisant de la polyactivité, de l’intermittence (alternance de périodes d’emploi et de non-emploi) et de la précarité « choisie » un nouveau mode de travail et de vie. L’auteur s’attache à mettre en lumière l’intrication entre un contexte, d’abord réducteur puis hyperpluralisant, et la production d’une individualité : dans quelle mesure le contexte rend-il possible, ou au contraire empêche-t-il, le « faire Sujet » ? Il vise, devant le constat que le modèle de la polyactivité et de l’intermittence tend à s’imposer comme une alternative désirée et désirable au salariat classique, à interroger la pertinence, sur le plan de la subjectivation, de ce fait social. Sur le plan théorique, le propos s’étaye sur le concept de Sujet et les conditions du faire Sujet tels que pensés par certains psychosociologues et cliniciens français. The article explores the links, for an individual, between the possibility of becoming a Subject and its tentative relationships to work and non-work activities. It relies on an extensive ethnographic and clinical study among a group of 40 “intermittent-workers” from the French Southwest Coast who used to be executives in large companies and that chose to quit deliberately a traditional relationship to work, under a permanent contract, in favor of a better quality of life, experimenting a new way of working accordingly: multiple jobs at the same time alternating with periods of unemployment and willful precariousness. It aims at understanding the extent to what the current climate of hyper-plural work and life stimulations prevents the individual from becoming a Subject and, conversely, it sheds some light on how individuals’ relationship to activity could be reconsidered to make it happen. From a theoretical perspective, the reflection builds on a peculiar approach of the subject and the process of subjectivizing, based on propositions from certain French psychosociologists and clinicians.