Smith, Étienne

« Senghor voulait qu'on soit tous des Senghor » - 2013.


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La face « externe » ou « internationale » de Léopold Sédar Senghor est bien connue. L’auteur de cet article s’intéresse à la face « interne », au penseur et arpenteur des petites patries à l’ethos de professeur. Il étudie la construction d’une mémoire nostalgique de ce Senghor chez des gens de lettres qui regrettent le système scolaire de leur jeunesse. Il montre en outre comment Senghor, dans les débuts de sa carrière politique, est parvenu à enchanter le projet de l’État-nation en construction, notamment en manipulant les ressources vernaculaires comme les parentés à plaisanterie, et comment cela a ensuite influencé cette mémoire senghorienne. Enfin, il explique comment celle-ci est devenue un enjeu et un argument dans les débats contemporains sur l’identité nationale au Sénégal. “Senghor wanted us all to be Senghors”Much has been written on the “public” or “international” Senghor. This article focuses more on the “private” Senghor, the thinker and teacher who travelled the length and breadth of the country’s neighbourhoods. It examines how the memory of Senghor was constructed by writers nostalgic for the school system of their youth. More broadly, it demonstrates how Senghor, in his early political career, managed to make the nascent nation-state project attractive by using local vernacular resources to create a kinship based on jokes, and the impact this had on the way he is remembered. Finally, it shows how the memory of Senghor has become an issue and an argument in contemporary debates on national identity in Senegal.