84

La pandémie de Covid-19 a engendré une crise de mortalité, tout en reconfigurant la prise en charge des personnes défuntes, tant du point de vue des pratiques que de la réglementation. De multiples évolutions ont été constatées durant cette période, lesquelles ont un impact sur le traitement et la trajectoire des corps morts. À partir de données issues du programme de recherche international « Mondes funéraires, personnes endeuillées et Covid-19 », adossé aux projets COFUNERAIRE (ANR) et No Lonely Deaths (FNS), cet article propose d’étudier les modalités de co-construction d’une réponse funéraire, en décrivant et analysant les ajustements et les nouvelles articulations professionnelles qu’elle a impliqués et leurs impacts sur les acteurs. La manipulation des corps et leur devenir, dans un contexte de massification et d’urgence, a conduit l’ensemble des professionnels à éviter que leurs actions basculent dans des logiques de type strictement « mortuaires » ce qui tranche avec une situation normale. Ainsi, les secteurs sanitaire et funéraire ont été confrontés aux mêmes difficultés et ont montré les mêmes attachements. En bouleversant les séquences mises en œuvre en temps ordinaire, la pandémie a mis au défi les logiques du prendre soin, induisant une forte charge émotionnelle chez les professionnels et des dilemmes éthiques.

The Covid-19 pandemic created a mortality crisis whilst simultaneously reconfiguring the care of deceased bodies, both in terms of practice and regulation. We have been able to observe multiple evolutions during this period which have impacted the treatment and trajectory of dead bodies. Based on data from the international research project “Funeral Worlds, the Bereaved and Covid-19”, supported by the COFUNERAIRE (ANR) and No Lonely Deaths (FNS), this article studies the ways in which funeral rites are co-constructed by examining how Covid-19 has impacted actors associated with funerals as well as how it has provoked new adjustments and articulations amongst funeral professionals. The handling and ultimate fate of bodies, in a context of broadening importance and urgency, has led professionals to avoid letting their actions fall into a “mortuary” logic. The health as well as the funeral sectors can be seen to have faced many of the same difficulties and showed the same attachments. By disrupting the ordinary sequences of events, the pandemic challenged the normal logic of care provision, creating a strong emotional burden for professionals alongside ethical dilemmas.