40

Malgré son apparente évidence, l’engagement de l’anarchisme français en faveur de l’écologie politique est un phénomène très récent. On sait toutefois que, dès le début du XXe siècle, une partie des militants libertaires se sont montrés sensibles aux thèses élaborées par les médecins naturistes et qu’ils ont présenté le retour à la nature comme une étape nécessaire à la régénération des individus et de la société. On peut alors se demander si les positions de ces anarchistes naturistes ne constituent pas l’une des sources de l’écologisme libertaire contemporain, et si leurs réalisations ont permis ou non de jeter les bases d’un projet d’organisation sociale fondé sur le respect du milieu naturel et le refus de sa domination. L’article tente d’éclairer cette question en étudiant le cas particulier de Louis Rimbault et de ses diverses expériences de vie dans des communautés libertaires, jusqu’à son décès en 1949. La Cité végétalienne Terre libérée, qu’il fonda près de Tours en 1923, et les positions qu’il a défendues dans ses écrits permettent de voir en lui, sinon un précurseur, du moins un homme à l’avant-garde de l’écologisme anarchiste.

Though apparently obvious, the commitment of French anarchism to political ecology is a recent phenomenon. It is known, however, that as early as the beginning of the 20th century, some libertarian activists were favourable to the theses formed by naturist physicians and presented a return to nature as a necessary step towards the regeneration of individuals in society. One may thus wonder whether the positions of naturist anarchists constitute one of the sources of contemporary libertarian ecology and whether their realisations allowed to establish the bases of a social organisation project founded on the respect for a natural environment and the refusal of man’s domination over it. This article seeks to bring this issue to light by studying the singular case of Louis Rimbault and of his diverse life experiences in libertarian communities until his death in 1949. The vegan city Terre libérée, which he founded near Tours in 1923, and the positions he defended in his writings reveal him as an avant-garde figure of anarchist ecology, if not a pioneer.